Page:Sand Musset Decori - Correspondance.djvu/68

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Eh bien, mon unique amie, j’ai été presque un bourreau pour toi, du moins dans ces derniers temps ; je t’ai fait beaucoup souffrir, mais Dieu soit loué, ce que je pouvais faire de pis encore, je ne l’ai pas fait. Oh ! mon enfant, tu vis, tu es belle, tu es jeune, tu te promènes sous le plus beau ciel du monde, appuyée sur un homme dont le cœur est digne de toi. Brave jeune homme ! Dis-lui combien je l’aime, et que je ne puis retenir mes larmes en pensant à lui. Eh bien, je ne t’ai donc pas dérobée à la Providence, je n’ai donc pas détourné de toi la main qu’il te fallait pour être heureuse ! j’ai fait peut-être en te quittant la chose la plus simple du monde, mais je l’ai faite, mon cœur se dilate malgré mes larmes. J’emporte avec moi deux étranges compagnes, une tristesse et une joie sans fin. Quand tu passeras le Simplon, pense à moi, George ; c’était la première fois que les spectres éternels des Alpes se levaient devant moi, dans leur force et dans leur calme. J’étais