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Page:Sandre - Le purgatoire, 1924.djvu/251

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les évasions

porche, en plein midi. Les hommes de garde lui avaient même rendu les honneurs. Quoi d’étonnant, puisqu’il portait une tenue très correcte d’officier allemand, et jusqu’au sabre ? Ailleurs, un capitaine s’était habillé en ecclésiastique sans se faire remarquer, il avait frappé à la kommandantur et, se présentant comme un prêtre suisse, chargé par la Croix-Rouge de visiter les prisonniers, ainsi qu’en témoignaient ses papiers en règle, il avait parcouru son camp en compagnie des officiers boches. On lui avait tout montré. Il s’était entretenu avec quelques-uns de ses camarades, il avait inscrit des notes sur son carnet, et toute la kommandantur le reconduisit jusqu’à la porte avec les marques du plus profond respect.

À Vöhrenbach, les déguisements furent moins romanesques, mais aussi curieux. Le plus commun était celui de nos ordonnances, qu’on surveillait un peu moins que les officiers. Toutes les après-midi, vers deux heures, une dizaine d’ordonnances, conduites par deux soldats allemands en armes, allaient chercher à la gare les colis arrivés par le train du jour. Elles emmenaient une charrette à bras. À la gare, on ne les serrait pas de si près qu’une fuite fût très malaisée. C’était un bon hasard à courir. Un lieutenant le courut. Il s’échappa. Mais on remarqua sa disparition au moment de rentrer. Il n’avait pas eu le temps d’aller très loin. On le reprit. Et l’ordonnance, qui lui avait prêté ses vêtements, fut expédiée vers un camp de troupe.

Rien de plus délicat que de franchir ces terribles fils de fer. L’homme le plus courageux ne s’y essayait qu’en tremblant, non point de la crainte des sentinelles