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cobern-coblence-mayence

semblables, eaux-fortes ou dessins à la plume. C’est aujourd’hui dimanche, le temps est beau, il y a du monde dans les rues et sur les places, et, comme si nous étions assis devant l’écran d’un cinéma, nous voyons ici des gens qui entrent à l’église au moment où la cloche sonne pour annoncer que la messe commence, et là, plus loin, nous assistons à la sortie de l’office.

De temps en temps, au sommet d’une montagne, un burg domine. Tantôt il est en ruines et tout croulant de poésie. Tantôt il dresse des murailles restaurées avec un goût qui lui donne un indélébile aspect de pacotille bien allemande.

Ces paysages sont majestueux. Tel est l’adjectif qu’il est ordinaire de leur appliquer. Il leur convient, et il est difficile de rester insensible devant eux, car ils imposent. Des vers de Hugo me viennent sur les lèvres :

…Qui que vous soyez, avez-vous ouï dire
Qu’il est dans le Taunus, entre Cologne et Spire,
Sur un roc, près duquel les monts sont des coteaux,
Un château renommé parmi tous les châteaux,
Et dans ce burg, bâti sur un monceau de laves,
Un burgrave fameux parmi tous les burgraves ?

Je les récite à mi-voix, pour moi-même, en pensant à autre chose, et je ne m’aperçois que je les récite que parce que la sentinelle de notre compartiment me regarde avec des yeux ronds.

Voici Boppard, nom que je refuse de considérer comme germanique. Et bientôt nous passons devant le célèbre rocher de la Lorelei. Eux aussi, les vers de Henri Heine me viennent sur les lèvres, et la senti-