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Page:Sarcey - La route du bonheur, 1909.djvu/220

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la femme.

comprends, cousine ! Car, jusqu’à présent, je n’entendais point malice à la question ; mais, aujourd’hui, par la vertu d’une petite mésaventure qui vient de fondre sur moi, je sens qu’entre le mot et la chose il y a place pour bien des erreurs.

Je croyais bonnement qu’une femme du monde se reconnaissait là son éducation, à sa tenue pleine de tact, à ce je ne sais quoi d’aimable et d’enjoué que donne, seule, une culture délicate de l’esprit et du cœur… Dans mes songes creux, ce terme impliquait une manière de petite supériorité morale ; j’attribuais ces blasons de noblesse à toutes les femmes qui savaient penser et rendre, avec grâce et aisance, ces mille riens qui donnent de l’agrément à la vie, et révèlent, en quelque sorte, une qualité d’âme raffinée.

La « femme du monde », dans mon imagination, pouvait être dépourvue d’atours, de richesse, de chic et de montant ; il me semblait indispensable qu’elle eût le ton de la bonne compagnie, le don d’exprimer agréablement et justement ses sentiments intimes ; que ces sentiments fussent au-dessus du vulgaire : qu’elle ne parlât point à tort et à travers, mais avec mesure, et ne confondît point le bruit avec la gaieté ; qu’enfin, elle sût évoluer dans le monde