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Page:Sarcey - La route du bonheur, 1909.djvu/266

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la femme.

d’une courte nouvelle, cette autre réflexion en ses conclusions semblable :

« Qui a rêvé, rêvera ; celui qui, une première fois, a évoqué un fantôme d’outre-tombe, évoquera des légions de fantômes… »

Qui a rêvé, rêvera !

— Voilà, pensai-je, une femme dont la marque particulière est de « rêver ».

Et j’essayai d’évoquer sa silhouette : longue, probablement, comme la tige délicate d’une fleur ; des yeux agrandis par les songes éveillés ; un visage de poésie, une démarche ailée, un sourire doux, une voix de musique…

Et je vis Matilde Serao.

El je découvris une force de la nature, le Vésuve en éruption, le soleil quand il brûle, la tempête quand elle gronde, le torrent en cascade… Le rire généreux de cette femme eût fait rire des morts ; sa voix secouait les vitres.

— Ma chère madame Sarcey, dit-elle en roulant les r comme un tambour, j’ai tant aimé votre illustre père, tant ! tant !

Et, tout en scandant ces « tant ! tant ! » de caressantes inflexions italiennes, elle me broya les mains, et je sentis un peu de sa chaleur descendre en moi.

Était-elle belle ou laide ? Je n’aurais su le