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Page:Sarcey - La route du bonheur, 1909.djvu/32

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la jeune fille.

Il fit comme il dit. Il installa notre protégée chez une lady à Londres, où elle se rendit aimable, indispensable et se créa des relations utiles.

Aujourd’hui, Odette a dix-huit ans ; elle est professeur libre, possède des amis et gagne plus de trois mille francs par an.

Eut-elle de la chance ?

Peut-être. Elle eut, surtout, du courage et un heureux caractère. Ce sont les deux plus belles formes de la chance… Une autre eût peut-être refusé cette pitoyable place chez le pasteur chargé de famille et se fût entêtée dans un art pour lequel elle n’était pas faite. Une autre eût versé toutes les larmes de son corps en constatant la misère dans laquelle sa jeunesse était plongée. Une autre, par désespoir, se fût tuée, peut-être.

Odette partit en Angleterre en qualité de bonne d’enfants. Elle avait le ravissant optimisme des âmes vraiment courageuses.

Elle faisait sa chance.

Ah ! petites créatures de dix-neuf ans, malheureuses et douloureuses, qui me lisez, si jamais, un jour, une pensée lugubre traversait votre cervelle, n’imitez point l’exemple de l’enfant qui dort aujourd’hui de son dernier sommeil ; laissez là des joujoux qui ne sont pas faits pour les petites filles…, et tâchez de ressembler à Odette.