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Page:Sarcey - La route du bonheur, 1909.djvu/390

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l’enfant.

tagne. Plus tard, jeunes gens et jeunes filles s’assemblent en société et chantent très sérieusement sous la direction d’un chef qu’ils ont choisi. Les hommes ne pensent point à boire, les filles ne songent pas à courir ; ils chantent et sont heureux. D’ailleurs, vous les entendrez à la Fête des Vignerons, et vous verrez à quels ensembles étonnants ces rustauds des montagnes, ces ouvriers des usines, sont arrivés.

Ah ! cette Fête des Vignerons. Elle tourne, en ce moment, toutes les têtes et, depuis Genève jusqu’à Villeneuve, on n’entend que ces mots :

— Serez-vous à la Fête ? Êtes-vous de la Fête ?

Les menuisiers, les charpentiers, font rage tout le jour, clouant, tapant les gradins d’un théâtre de forme antique, ne contenant pas moins de douze mille cinq cents places numérotées ; et le soir, tandis que la nuit descend et que des étoiles s’allument au ciel, on aperçoit des ombres qui rasent les murs et se rejoignent, avec un mot de passe, sous le portique grec.

Ce sont de jeunes divinités qui viennent répéter, et de très sages Bacchantes qui se tiennent par la main. Mlle Palès, la fille du boucher, une jolie brune, au teint mat, — beauté assez rare en Suisse, — serre la main de Mlle Cérès, une blonde opulente ; et toutes deux échangent, à voix basse, quelques confidences mystérieuses, tandis que