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ACTE QUATRIÈME.

Il reste d’abord sur le seuil, embrassant la pièce d’un coup d’œil comme un homme qui veut se rendre compte de l’endroit où il est, et ne voit pas Cordelia à moitié disparue sur l’escalier. — Puis il descend regardant toujours autour de lui !… avec une surprise croissante, quand il reconnaît la chambre.)

ORSO.

Cette chambre ?… Oui !… Cette fenêtre ! (Il y va.) C’est elle !… le palais Saracini !… Comment suis-je dans cette maison ?… (Il se retourne et aperçoit alors Cordelia qui redescend à gauche ; le petit jour commence à paraître au fond, et pendant la scène, la lumière va croissant jusqu’au jour complet.) Cordelia !

CORDELIA.

Lui !… (Par un sentiment naturel de répulsion, elle passe vivement à gauche, séparée de lui par la table et le siége.)

ORSO.

Cordelia qu’on disait morte !… Es-tu son ombre ?…

CORDELIA, même sentiment de révolte naturelle.

Son ombre t’aurait déjà fui !…

ORSO, allant à elle.

Vivante !… (Il s’arrête à mi-chemin, frappé d’une idée subite.) Grand Dieu ! cette femme dans le cloître, avec Uberta ?… Celle qui m’a frappé ?…

CORDELIA, à la même place, et de même.

C’est moi !…

ORSO.

Bien pour cela ! — C’était vengeance !… et de toi à moi, je l’accepte !… Mais comment suis-je dans ta propre demeure ?… et qui m’y a conduit ?…

CORDELIA.

Peu importe !…

ORSO, allant jusqu’à la table, qui seule le sépare de Cordelia, et regardant celle-ci avec attention.

Et cette autre femme que j’entrevois dans mon délire, penchée sur moi… me donnant à boire ?… qui est encore cette femme-là ?…