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LES FEMMES FORTES.

est dans toute la fleur de sa dix-huitième année, et moi, monsieur Lachapelle, je ne suis plus une toute jeune fille ! Elle en est à ses premières impressions, prête à se modeler sur la volonté de son seigneur et maître, et moi… j’ai mon petit caractère qu’on aurait bien de la peine à refaire… enfin, elle aura certainement une belle dot, et moi…

LACHAPELLE, se récriant.

Oh ! mademoiselle !

CLAIRE.

Oh ! je sais bien que vous avez le cœur trop noble pour vous arrêter à cela…

LACHAPELLE.

Dites au contraire que c’est une raison, mademoiselle.

CLAIRE.

Oh ! je le sais, et c’est parce que je suis bien touchée de votre générosité, que je m’intéresse à votre bonheur et que je vous dis tout de suite où il est…

LACHAPELLE.

Vraiment, vous croyez que mademoiselle Gabrielle…

CLAIRE.

Vous l’aimez ! Rentrez chez vous, pensez-y bien, et vous verrez ce soir si je n’ai pas dit la vérité.

LACHAPELLE.

Ah ! je suis curieux… Je sais bien qu’elle est jolie !…

CLAIRE.

Je crois bien !…

LACHAPELLE.

Spirituelle, vive… trop vive, même !

CLAIRE.

Tant mieux ! Avec vous, qui hésitez toujours !

LACHAPELLE.

C’est juste ! Je n’avais pas pensé à cela. Seulement, je lui crois une volonté !

CLAIRE.

Elle en aura pour vous ! qui n’en avez pas !

LACHAPELLE.

C’est juste ! Elle en aura pour moi !

CLAIRE.

Et si bonne au fond…