Page:Satires d'Horace et de Perse.djvu/109

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Je n’ai pas les talens de cet illustre auteur,
Et rends d’ailleurs hommage aux droits de l’inventeur.
Mais je l’ai censuré ! je n’ai pas craint de dire
Qu’ennemi du travail qu’exige l’art d’écrire,
Tel qu’un torrent fougueux qui roule un noir limon,
Le mauvais dans ses vers l’emporte sur le bon !
Vous qui me reprochez une critique amère,
Ne reprenez-vous rien dans le divin Homère ?
Et Lucile, à vos yeux si discret, si poli,
Trouve-t-il de tout point Accius accompli ?
Ne le voit-on jamais, d’un trait plein de finesse,
D’Ennuis, quand il dort, réveiller la paresse ?
Et croit-on, pour oser critiquer leurs écrits,
Qu’il se mette au-dessus de ces rares esprits ?
Qui nous empêche donc, quand nous lisons Lucile,
De nous rendre raison des défauts de son style ?
De voir si ces défauts, qu’on lui trouve en effet,
Tiennent à son génie ou naissent du sujet ;
Et de chercher comment de sa muse indolente,
L’expression n’est pas plus pure, plus coulante,
Que s’il parlait en prose, ou que s’il suffisait
De six pieds, selon lui, pour qu’un vers fût parfait,
Fier d’en avoir écrit dans la même journée,
Quatre cents le matin, autant l’apres-dînée ?
Comme ce Cassius, le phénix des toscans,
Dont les vers à grands flots débordés tous les ans,
Dans leur rapide essor à tel point se grossirent,
Que de bûcher, dit-on, ses œuvres lui servirent.
Que Lucile parfois ait un certain éclat ;
Que son ton soit poli ; qu’il soit plus délicat,