Tantôt fier sanglier, tantôt affreux dragon,
Ici fleuve ou taureau, là rocher ou poisson.
S’il est extravagant de jeter sa richesse,
Si le soin qu’on en prend annonce la sagesse,
Conçoit-on un mortel plus fou que Périllus
Qui te prête un argent qu’il ne reverra plus ?
Venez, et sur ces bancs rangez-vous en silence,
Vous que séduit l’éclat d’une vaine opulence,
Qu’entraînent les plaisirs, l’amour, l’ambition,
Et, le plus grand des maux, la superstition :
Venez, tenez-vous prêts : il est tems de vous dire
Comment vous êtes tous dans un égal délire.
Avares, prenez place au premier rang des fous :
Il ne croit point assez d’ellébore pour vous.
Non, tout ce qu’il en vient des rives d’Anticyre,
Pour guérir vos cerveaux ne pourrait point suffire.
Galba sur son tombeau veut qu’on grave à combien
Monta ce qu’en sa vie il amassa de bien ;
Si non, avant d’oser s’en partager la somme,
Ses neveux donneront des jeux publics à Rome,
Et feront, à leurs frais, distribuer en pain,
Plus de blé qu’on n’en sème au rivage Africain.
Que l’on m’approuve ou non, dit-il, tel est mon ordre :
De grâce, point d’avis : je n’en veux pas démordre.
— Sans doute par ces mots, vieillard fin et subtil…
— Qu’y voyez-vous de fin ? et de quoi lui sert-il
Que sa tombe, en vertu d’une clause insensée,
Dise un jour quelle somme il avait amassée ?
— Voulez-vous le savoir ? L’indigence à ses yeux,
Tout le tems qu’il vécut, fut un vice odieux ;
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