Page:Satires d'Horace et de Perse.djvu/217

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Et souvent on l’a vu, désertant vers la brune,
D’un palais somptueux la splendeur importune,
Courir se renfermer dans ces impurs réduits
Où Dave rougirait d’aller passer les nuits.
Aujourd’hui sans pudeur plongé dans la mollesse,
Demain prêt, pour s’instruire, à partir pour la Grèce,
C’est l’inconstance même, et ses esprits mouvans
Ne sont guidés, je crois, que par le dieu des vents.
Le joueur Albius, les doigts rongés de goutte,
En proie à des douleurs qu’il mérita sans doute,
Pour tenir en son lieu les dez et le cornet,
Tant de sa passion l’ardeur le dominait !
Prenait à tant par jour un homme à son service,
Et, d’un cœur obstiné s’attachant à son vice,
Valait mieux que ces gens dont l’esprit incertain
Abandonne le soir ses projets du matin.
— Est-ce fini bientôt, et me diras-tu, traître,
À qui ce beau discours s’adresse ? — À vous, mon maître.
— À moi ! comment cela ? — Vous louez du bon tems
Les rustiques vertus et les faits éclatans :
Eh bien ! qu’un dieu pour vous ramène ces vieux âges,
Vous en condamnerez vous-même les usages ;
Soit, que vous n’ayez point de foi dans les discours
Qu’on vous entend si haut déclamer tous les jours,
Soit que, dans le sentier d’une vertu rigide,
Ne marchant que d’un pas indécis et timide,
Votre pied dans la bourbe encore embarrassé,
En dépit de vous-même, y demeure enfoncé.
À Tibur, vous vantez le séjour de la ville.
À Rome, de Tibur vous regrettez l’asyle.