Cet homme toutefois, à force de constance,
Croit avoir du destin vaincu la résistance.
Déjà, dit-il, je vois mes désirs accomplis,
Et mes bœufs engraissés et mes greniers remplis ;
Il le croit, jusqu’au jour où trompé, sans ressource,
À peine un dernier sou se désole en sa bourse.
Qu’un trésor tout-à-coup s’offre à vos yeux surpris ;
Qu’on vous montre une bourse, une coupe de prix,
Vous en suez ! le cœur vous bondit d’allégresse,
Et je vous vois verser des larmes de tendresse.
De-là sur les autels de nos dieux protecteurs,
L’or des vaincus porté par les triomphateurs ;
De ces dieux en effet la majesté sacrée,
N’a-t-elle pas bien droit à la barbe dorée,
Quand leur bonté, la nuit, par des soins complaisans,
Des songes les plus purs vient enivrer nos sens ?
L’or a banni le cuivre en honneur sous Saturne :
De la simple vestale il a remplacé l’urne :
Il a fait dédaigner et l’argile et le bois
Qui suffisaient jadis au second de nos rois.
Esprits vides du ciel et courbés vers la terre !
Pourquoi porter vos mœurs aux pieds du sanctuaire ?
Pourquoi, jugeant les dieux d’après vos sentimens,
Leur prêter de vos goûts les vains rafinnemens ?
C’est là, c’est cette erreur au genre humain fatale,
Qui court ravir si loin la perle orientale :
Qui mêle la canelle au fruit de l’olivier :
Qui cherche les grains d’or épars dans le gravier,
Et qui par le murex, dont la liqueur s’altère,
Fait prendre à nos toisons une teinte étrangère.
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