Page:Satires d'Horace et de Perse.djvu/277

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C’est un homme abruti, dans la fange plongé,
Qui ne sait ce qu’il perd. Malheureux naufragé,
Rien ne peut désormais le tirer de l’abîme.
Grands dieux ! si vous voulez faire pâlir le crime ;
Si vous voulez punir ces farouches tyrans
Qui, le cœur embrasé de poisons dévorans,
Dans les sombres accès de leur noire furie,
Sont prêts à déchirer le sein de la patrie,
Qu’à leurs yeux la vertu dévoilant ses attraits,
De l’avoir pu trahir ils sèchent de regrets !
Les sourds mugissemens du taureau de Sicile,
L’effroi de Damoclès, quand, d’horreur immobile,
Soudain il vit le fer qui menaçait son front,
Étaient moins douloureux que ce chagrin profond,
Que ces mots étouffés dans le sein d’un coupable :
Je me perds, je me perds…. secret épouvantable
Qu’à sa femme qui dort sur le même oreiller,
Seul, dans l’ombre des nuits, il n’ose révéler.
Jadis, il m’en souvient, élève peu docile,
Je savais à propos me frotter les yeux d’huile,
Quand je ne voulais pas, dans un style ampoulé,
Répéter de Caton le discours boursouflé ;
Discours dont toutefois mon père dans l’ivresse,
Tous ses amis présens, eût pleuré de tendresse.
J’avais, ou je croyais alors avoir raison,
Moi qui, pour toute étude et pour toute leçon,
Désirais qu’un ami, dirigeant mon enfance,
Du noble jeu de dés m’enseignât la science ;
M’apprît des divers coups les savans résultats ;
Ce que valait le Six, ce qu’on perdait sur As ;