Page:Satires d'Horace et de Perse.djvu/43

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Mais si Pomponius avait encor son père,
En serait-il repris sur un ton moins sévère ?
C’est donc peu que des vers soient écrits purement,
Si, quelques mots changés de place seulement,
Tout ce que le dépit au bon Chrêmes inspire,
À son fils, comme lui, tout autre eût pu le dire.
Des vers que je compose et de ceux que jadis
Lucile parsema de tant de traits hardis,
Retranchez les repos, la mesure, le nombre,
À peine du poète il restera quelque ombre ;
Mais que, dans Ennius, Mars, la hache à la main,
Du temple de Janus brise les gonds d’airain,
En vain de pareils vers vous romprez l’harmonie ;
Leurs lambeaux garderont l’empreinte du génie.
Mais c’est trop prolonger cette discussion ;
Il s’agit, et c’est là toute la question,
De savoir, quelque nom qu’on donne à la satire,
D’où vous vient tant d’horreur pour ce genre d’écrire.
Que, son libelle en main, de quartier en quartier,
Caprius se promène et s’enroue à crier ;
C’est au fripon de craindre, et non à l’honnête homme ;
Mais, vous, quand vous seriez déshonoré dans Rome,
Quand vous ressembleriez au brigand Cœlius,
Dois-je vous faire peur ? Et suis-je un Caprius ?
Pourquoi donc m’éviter ? Voit-on mes vers caustiques,
Au coin des carrefours, dans les places publiques,
Pâture du vulgaire, et faits pour ses plaisirs,
Du chanteur Hermogène occuper les loisirs ?
Non, non : je ne suis point de ces gens en délire
Qui sans cesse et partout ont un chef-d’œuvre à lire ;