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LIV. I. SATIRE VI. 69

Quelque part qu’il se montre, entend sur son passage,
Les filles s’informer de l’air de son visage,
Comment il a les dents, la jambe, les cheveux ;
Ainsi celui qui vient, sous un titre pompeux,
Promettre à la patrie un magistrat habile,
Prenant sur lui le soin de protéger la ville,
L’empire, l’Italie et les temples des dieux,
Inspire à tout le peuple un désir curieux,
Et chacun veut savoir quel est, d’où vient son père,
Et s’il n’a point peut-être à rougir de sa mère.
— Quoi donc, fils de Dama, de Géta, de Dromus,
Tu livres des romains au glaive de Cadmus !
Tu rougis de leur sang la roche tarpéïenne !
— La noblesse d’Arthur est moindre que la mienne :
Il n’est que ce qu’était mon père. — Et, pour cela,
Tu te crois un Pison ! un Paul ! un Messala !
Mais Arthur, à défaut d’ancêtres plus célèbres.
Si le bruit de cent chars, de trois convois funèbres,
Se mêlait au fracas du clairon et du cor,
Seul pourrait les couvrir de sa voix de stentor :
C’est un mérite au moins, et qui nous en impose.
Mais enfin, puisqu’il faut que je plaide ma cause,
J’en reviens à moi-même, à ce fils d’affranchi,
Qu’insulte, à tout propos, un peuple irréfléchi,
Jaloux, et de me voir, par un choix honorable,
Aujourd’hui, cher Mécène, admis à votre table,
Et de ce qu’autrefois je fus nommé tribun :
Deux honneurs cependant qui n’ont rien de commun ;
Car je veux qu’à l’armée, on m’ait pu croire indigne
D’obtenir de Brutus cette faveur insigne,