Page:Satyre menippee garnier freres 1882.djvu/108

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nous avons mesnagé des processions nompareilles, qui ont obscurcy le lustre des plus belles mommeries qui furent oncques veues ; nous avons faict semer soubs main par toute la France du Catholicon d’Espagne, voire quelques doublons qui ont eu des effects merveilleux, jusques aux cordons bleuz Politiques.

Qu’eussé-je peu faire davantage, sinon me donner aux Diables par engagement et avancement d’hoyrie, comme j’ay faict ? Lisez les livres de Josephe, de la guerre des Juifs, car c’est quasi un mesme faict que le nostre, et jugez si les zelateurs Simon et Jean ont eu plus d’inventions et deguisements de matieres, pour faire opiniastrer le pauvre peuple de Jerusalem à mourir de rage de faim, que j’en ay eu pour faire mourir de la mesme mort cent mil ames dedans ceste ville de Paris ; jusques à faire que les meres ayent mangé leurs enfants[1], comme ils firent en ceste sacrée cité. Lisez ceste histoire, je vous en prie, et pour cause, et vous trouverez que je n’ay espargné, non plus qu’eux, les reliques les plus sainctes et ustensiles d’Eglise que j’ay peu faire fondre pour mes affaires. J’ay cent fois violé ma foy particulierement jurée à mes amis et parents, pour parvenir à ce que

  1. S’il faut en croire les Mémoires de la Ligue, une dame mangea ses deux enfants morts de faim pendant le siège de Paris.