Page:Satyre menippee garnier freres 1882.djvu/253

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sortit de sa maison sur les dix à unze heures pour se faire veoir par les rues, et par sa presence donner le signal de la revolte generale qui mit incontinent le feu en la teste de tous les conjurateurs, lesquels, comme forcenez et furieux, se ruerent sur les Suysses du Roy, qu’ils taillerent en pieces. Et les autres gens de guerre se voyants renfermez entre deux barricades, devant et derriere, sans s’être osé deffendre à cause que le Roy leur avoit deffendu, se rendirent à la mercy de vostre frere, qui les fit conduire enseureté hors de la ville. Ce qu’il fit non tant par clemence et douceur qui luy fust naturelle que par ruses et cautelle, pour mieux parvenir à son dernier but qui estoit de se saisir du Roy, lequel il voyoit en armes, sur ses gardes en son Louvre, mal aisé à forcer si promptement sans grand massacre. Son artifice donc fut de filer doux et de contrefaire le piteux, disant qu’il avoit un extrême regret de ce qui estoit advenu. Cependant il visitoit les rues pour encourager les habitants, il s’assuroit des places fortes, il se fit maistre de l’Arsenac, où il avoit bonne intelligence avec Selincourt[1], pour avoir le canon, les poudres et les boulets à sa devotion ; il enjola de belles paroles le pauvre chevalier du guet, qui luy

  1. Gouverneur de l’Arsenal.