Page:Saurin - Œuvres choisies, Didot, 1812.djvu/62

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Ta magnanimité

Te donne droit au moins à ma sincérité.

Spartacus, ta vertu si hautement éclate,

Je te dois tant, enfin, que je serais ingrate

Si, prête à te quitter, de vains déguisements.

Te dérobaient encor mes secrets sentiments.

Non, d'un trop noble feu je me sens l'âme atteinte

Pour vouloir avec toi m'abaisser à la feinte :

Je t'aime... Reçois-en le généreux aveu,

Qu'au moment de te dire un éternel adieu,

Mon estime te fait, et non pas ma faiblesse.

Spartacus
faisant un mouvement vers elle.

Ah !...

Émilie
l'interrompant.

Permets que j'achève... Oui, mon cœur te confesse

Qu'en toi je n'ai pu voir avec tranquillité

Tant d'héroïsme, joint à tant d'humanité ;

Mais tu connais les lois que le devoir m'impose,

Cet obstacle éternel que mon pays t'oppose,

Cet invincible mur qu'il élève entre nous ;

Ce devoir est sacré, c'est le premier de tous.

Je t'aime, Spartacus, et la vertu m'est chère ;

Mais tous mes vœux seront pour Rome et pour mon père.

Spartacus

Quelle gloire pour moi qu'un aveu si flatteur !

Qu'en me désespérant il console mon cœur !

Qu'il déchire, à la fois, qu'il élève mon âme !

Oui, je sens que l'aveu d'une si noble flamme :

Prête un nouveau courage à ma faible vertu :

Le tourment de vous perdre en est sans doute accru ;

Mais...

Émilie

J'ai réglé mon sort ; et si Rome succombe,

Le ciel sous ses débris aura marqué ma tombe.

Mais aussi, Spartacus, si tu péris...

{{Personnage|Spart