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244 DATE DE LA MUTATION QUI PRODUISIT LES SONANTES LONGUES.

singularité. On classera parmi ces racines pu « pourrir > qui ne possède d'à dans aucun idiome et qui, en revanche, offre un u bref dans le lat. pû-tris. Il serait bien incertain de poser sur de tels indices une série u : u, parallèle par exemple à a^w : u. Qu'on ne perde pas de vue l'a du skr. bhâvati, bhdvîtva.

��Ce n'est point notre intention de poursuivre dans le grec ou dans d'autres langues d'Europe l'histoire fort vaste et souvent ex- trêmement troublée des racines udâtiâs. Nous bornerons notre tâche à démontrer, si possible, que les phénomènes phoniques étudiés plus haut sur le sanskrit et d'où sont résultées les longues î, u, f, n, m, ont dû s'accomplir dès la période indo-européenne.

Pour la série de l'i, cette certitude résulte de l'f paneuropéen des formes faibles de l'optatif (p. 179 seq.).

Dans la série de Vu, on peut citer l'indo-eur. dhu-mâ de la racine qui est en sanskrit dhavi, le si. ty-ti «s'engraisser» en regard du skr. tâvï-ti, tavi-sd, tuvi, tti-ya; le lat. pu-rus en regard de pavi- târ, pû-tà. Ce qui est à remarquer dans les verbes grecs ôùuj et Xuuj (skr. dhavi dkû, lavi lu^), ce n'est pas tant peut-être la fré- quence de l'u long que l'absence du degré à diphtongue. Qu'on compare kXcu k\u = skr. çro crû, irXeu rrXu = skr. plo plu, peu pu = skr. sro srù, x^u x^ = skr. ho hû^. Cette perte marque nette- ment la divergence qui existait entre les organismes des deux séries.

Passons à la série des liquides.

A. Devant les consonnes.

Quiconque reconnaît pour le sanskrit l'identité parnâ = '"pr'^nâ devra forcément, en tenant compte de la position de la liquide dans le lituanien pWnas, placer du même coup Vépoque de la mu- tation dans la période proethnique. Et quant à la valeur exacte jiu produit de cette mutation, nous avons vu que, sans sortir du sanskrit, on est conduit à 5' voir un r-voyelle (long), non point par exemple un groupe tel que ar ou ^r. Entre les idiomes euro-

��1. Ko^po-XÛTTiç • paXavTio-TÔ|ioç Hes. est intéressant au point de vue de l'étymologie de Xûai.

2. Dans le latin, où rùtus et inclutus sont les seuls participes du passif en -û-to, la longue ne prouve pas grand chose. Elle se montre même dans 8ecûttis et locûtus. Les exemples qui, sans cela, nous intéresseraient sont so-lûtus et peut-être argûtus, si l'on divise arguo en ar -f- guo = huvâti.

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