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l’âme en bourgeon


La larme qui me monte aux yeux, tu la connais,
Elle a le goût profond de mon sang sur tes lèvres,
Tu sais quelles ferveurs, quelles brûlantes fièvres
Déchaînent dans ma veine un torrent acharné.

Je vois tes bras monter jusqu’à ma nuit obscure
Comme pour caresser ce que j’ai d’ignoré,
Ce point si douloureux où l’être resserré
Sent qu’il est étranger à toute la nature.

Écoute, maintenant que tu m’entends encor,
Imprime dans mon sein ta bouche puérile,
Réponds à mon amour avec ta chair docile :
Quel autre enlacement me paraîtra plus fort ?

Les jours que je vivrai isolée et sans flamme,
Quand tu seras un homme et moins vivant pour moi,
Je reverrai les temps où j’étais avec toi,
Lorsque nous étions deux à jouer dans mon âme.