Page:Sauvage - Tandis que la terre tourne, 1910.djvu/146

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
146
tandis que la terre tourne

Le sein est l’outre où vont encore tes tendresses,
Tu laisses au frelon notre miel tartiné ;
Mais bientôt plus vaillant sur tes jambes tremblantes
Tu sauteras dans l’herbe avec les criquets verts
Et tu voudras saisir dans les griffes des plantes
La mûre granuleuse et les bourgeons amers.
Comme je me ferai petite pour te plaire ;
Nous jouerons, nous verrons avec des yeux naïfs
La libellule boire au courant de l’eau claire
Et la guêpe effarer les agneaux attentifs.
La courtillère en ses couloirs de terre fraîche
Ronflera de plaisir ; tu passeras tes bras
Au cou de la brebis, nous mordrons dans la pêche,
Comme le limaçon cornu tu baveras.
La mante paraîtra monstrueuse et sournoise
Dans l’agenouillement de ses bras anguleux.
Nous ferons des gâteaux charmants où la framboise
Mettra son mufle pourpre au cœur des graviers bleus.
Nous construirons avec des boulettes de terre
Des châteaux olympiens pour loger un grillon.
Au sommet flottera la brindille légère
D’un rameau de fenouil servant de pavillon.