Page:Savard - Principes de la musique et méthode de transposition, 4e édition.djvu/78

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74. Nous avons vu qu’en prenant les sons dans leur justesse rigoureuse, le ton se trouvait partagé en deux demi-tons inégaux : l’un de cinq commas, le demi-ton chromatique ; l’autre de quatre, le demi-ton diatonique.
xxSi donc on franchit d’abord le demi-ton chromatique, il ne reste plus qu’un demi-ton diatonique pour aller à la note suivante.
xxSupposons, par exemple, que nous voulions aller chromatiquement d’ut à  : si nous faisons d’abord le demi-ton chromatique ut ut ♯, alors nous ne serons plus éloignés du que d’un demi-ton diatonique (4 commas) ; aussi cet ut dièse tend-il beaucoup plus à monter au qu’à retomber à l’ut naturel.
xxSi, au contraire, on veut descendre chromatiquement du à l’ut, on procédera en sens inverse, et l’on fera , ré , ut : le ré bémol tendant à descendre à l’ut, dont il est plus rapproché que du ré naturel.
Chromatiques ascendantes et
chromatiques descendantes.
75. Il y a donc deux sortes de notes chromatiques : les chromatiques ascendantes, qui sont produites, suivant le cas, par les dièses, les doubles dièses ou les bécarres annulant les bémols constitutifs ; et les chromatiques descendantes, qui, suivant les circonstances, sont formées par les bémols, les doubles bémols, ou les bécarres annulant les dièses constitutifs.
xxTelle est la raison pour laquelle la gamme chromatique (ainsi que nous l’avons indiqué au § 68) n’est pas notée habituellement de la même manière en descendant qu’en montant : on se sert naturellement des chromatiques ascendantes pour la monter et des chromatiques descendantes pour la descendre.
76. La distance d’un comma existant entre les sons, dièses et bémols, qui partagent un ton, est si petite, que ces sons se confondent presque. Ainsi, dans l’exemple précédent, l’oreille n’éprouve pas une grande difficulté à admettre l’un pour l’autre l’ut dièse et le ré bémol. C’est pourquoi les notes qui représentent des sons ayant entre eux une telle analogie sont appelées synonymes ou enharmoniques. Notes synonymes ou enharmoniques.
77. Le passage d’une note à la synonyme se nomme enharmonie[1]. Enharmonie.
78. Pour éviter l’extrême complication qu’aurait occasionnée la production exacte de chacun de ces sons sur certains instruments, et particulièrement sur les instruments à clavier, on a imaginé d’accorder ces instruments de manière que le ton fût partagé en deux demi-tons parfaitement égaux, ce qui permet de n’avoir qu’un même son, et par conséquent qu’une même touche, pour les notes synonymes. Par ce moyen, le véritable ut dièse et le véritable ré bémol de notre exemple n’existeront plus, mais ils seront remplacés, l’un et l’autre, par un son intermédiaire qu’on nommera, selon le besoin, soit ut dièse, soit ré bémol. On conçoit que, dans la pratique, un semblable défaut de justesse (la moitié d’un comma) devient tout à fait inappréciable. Tempérament.
  1. Du grec en, dans ; armonia, liaison, accord.