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RÉVÉLATIONS.

Et Mrs Moore, la voix sifflante et le regard méchant, ajouta en regardant la robe mouillée de Liette :

« Les parents ne viendront cependant pas vous donner des vêtements neufs pour remplacer les vôtres à peu près perdus !

— Oh ! Mrs Moore, s’écria Liette indignée des pensées monstrueusement égoïstes de la veuve. De quelle chair est donc pétri votre cœur ! jamais idées semblables ne me seraient venues à l’esprit.

— Je sais… je sais bien, vous êtes toujours la même… sans grande réflexion.

— C’est possible ! finit par répondre Liette toute frémissante, je ne changerais pas facilement, en cet instant, mes pensées pour les vôtres. »

La jeune fille prit d’autres vêtements, soigna sa chère petite Lottie, puis monta se coucher sans accorder la moindre attention aux murmures irrités de Mrs Moore.

Dès qu’elle fut au lit, une détente se produisit dans tout son être, elle versa un torrent de larmes, des mots incohérents sortirent de ses lèvres. Une fois les sanglots apaisés, elle se prit à sourire longuement à une douce vision ; puis, comme dans une extase, elle retomba sur l’oreiller et s’endormit profondément.

Le lendemain, à son réveil, il lui sembla que son cerveau sortait d’un sommeil léthargique. Elle se leva hâtivement, muis distraite, s’habilla toute fébrile, perdue dans sa rêverie.

Cependant un petit cri, une légère plainte de Lottie la ramenèrent subitement vers d’autres pensées. Elle se précipita vers le berceau de la frêle créature, qui lui tendait les bras ; elle reçut avec joie les tendresses délicates que sa petite main d’enfant promenait sur son visage.

Comme elle aimait cette chérie ! elle la voulut belle et pimpante comme pour une fête.

Elle lui passa sa fraîche et blanche toilette dans laquelle la mignonne semblait un cœeur de rose dans sa petite corolle. Elle coiffa avec soin ses doux cheveux, les roulant avec symétrie sur ses doigts pour les friser légèrement ; puis, en la voyant si jolie,