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LA TOUR DE LA LANTERNE.

Mme Baude leur ouvrit les bras.

La cause de Liette était gagnée. Par sa bonté, cette bonté supérieure qui enlace et retient les âmes, elle avait repris à tout jamais les cœurs de ceux qui l’avaient aimée jadis. Son énergique volonté avait enfin dominé la fatalité malheureuse qui semblait peser sur sa vie.

Elle allait vivre désormais au milieu des siens, sans jamais reparler de Mrs Moore, auprès de laquelle elle avait versé tant de larmes.

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À la mort de grand-papa, Liette a acquis les Gerbies où elle a respecté tous les chers vieux souvenirs. Seules de toutes les propriétés des environs, les Gerbies n’ont pas changé depuis un demi-siècle. C’est pour elle une joie bien douce de voir Lottie et ses enfants jouer à l’ombre des mêmes vieux arbres qui ont abrité sa bienheureuse petite enfance.

M. Harris Dillon avec la fortune de sa femme vient de fonder aux portes de La Rochelle une grande usine. Pour l’inauguration de la belle demeure qu’il a fait construire à côté, toute la famille de Liette a été invitée. Comme jadis, l’oncle Rigobert, à cette occasion se propose de tirer un superbe feu d’artifice.

Lictte, au milieu des siens et dans la splendeur de sa maturité radieuse, sourit comme autrefois à son cher entourage. Elle lui montre au loin la Tour dentelée, l’inoubliable et magique lanterne, immense fanal que les rayons du soleil, cet autre artificier, semblent avoir tout exprès allumé en cet instant, et qui émerge des vieux remparts que la mer baigne à cette heure dans un miroitement lumineux.

Telle qu’elle lui apparaissait dans sa jeunesse, telle qu’elle la voyait dans ses rêves d’enfant et dans ses visions lugubres, elle la contemple enfin, et avec quel attendrissement, dans son cher et doux pays de France.