Page:Savignon - Filles de la pluie.djvu/144

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le courant, allait infailliblement se perdre sur les récifs, quand une jeune fille qui l’avait aperçue du rivage, se jeta tout habillée à l’eau et nagea vers la chaloupe. Embarquée, elle la pilota à travers les écueils et l’amena, avec les quatorze hommes qui la montaient, jusqu’à la cale de Pen ar Roc’h.

Tel quel, le récit, n’est pas tout à fait exact.

Des objections, en nombre, se présentent à l’esprit, dont la pire est que Rose ne sait pas nager — Et puis, l’équipage d’une chaloupe est-il vraiment en danger, quand on peut, de terre, atteindre cette embarcation ?.. On comprend mal, en outre, qu’un de ses passagers n’ait pas réussi à aller jusqu’à la côte, puisqu’une femme, alourdie par ses vêtements, sut, elle, parvenir jusqu’à la chaloupe.

Entendons-nous. Rien de ceci n’est pour amoindrir son courage. La spontanéité du geste de Rose fut magnifique. Mais on en a, nous semble-t-il, à nous, Ouessantins, exagéré les effets. Les « Parisiens » ont consacré Rose « héroïne ». Ils ont sagement agi. C’est en pleine légende que se taillent les images d’Épinal. Et il leur faut des images, des légendes et des héroïnes. — Ici, voyez-vous, nous sommes trop près pour reconnaître la mer