Page:Savignon - Filles de la pluie.djvu/274

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des mains de l’ennemi, au cours d’un combat en Mauritanie. Cette histoire, toute l’île la connaissait. Car ce terrible sauveur, au lendemain de chaque nouvelle incartade, brandissait son récit, comme un rappel au capitaine d’avoir, à son tour, à le tirer d’un mauvais pas, lui, Engel, qui allait une fois par jour brosser ses habits et seller son cheval, dans une joie immense d’approcher quelque chose d’un degré plus haut que lui sur l’autel de la patrie, un sentiment analogue à la jubilation mystique de la dévote admise aux petits soins de la sacristie. C’était là tout son travail.

... Engel, l’amant de Marie de Loqueltas ! Du diable, si j’aurais supposé cela !


Alors, quelque temps plus tard, j’avais en badinant raconté à Marie :

— On m’a parlé de vous à Brest.

— Qui donc ? fit-elle, incrédule.

— On m’a dit: « Le bonjour à Marie. Annoncez-lui que j’écrirai bientôt ».

— Bien vrai ?

— Bien vrai.

Et Marie s’en était allée en riant.

Mais le lendemain elle m’arrêta et, sérieuse, quoiqu’elle eût l’air de se moquer :