Page:Say - Œuvres diverses.djvu/288

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je me bornerai à rappeler ce qui a été prouvé ailleurs, que les exportations du pays qui a le commerce extérieur le plus florissant, sont peu de chose, comparées à sa consommation intérieure ; d’où il suit que le commerce extérieur exerce sur la prospérité d’un État une bien moins grande influence qu’on ne le croit généralement. Si l’Angleterre a beaucoup prospéré pendant la dernière guerre, c’est bien moins à sa prépondérance maritime qu’elle l’a dû, qu’aux étonnants progrès de son industrie intérieure durant la même période. La France a prospéré aussi ; et elle n’avait point de commerce maritime. Si elle avait été aussi industrieuse que l’Angleterre, l’univers aurait offert le spectacle curieux de deux grandes nations prospérant également, l’une avec un grand commerce extérieur, et l’autre s’en voyant presque entièrement privée[1].

Ces questions sont immenses. Elles tiennent à toutes les parties de l’économie sociale, qui a été trop peu connue jusqu’ici ; mais tout nous annonce que ce genre de connaissance est destiné à faire de grands pas à l’avenir.

  1. Nous avons lu dernièrement des discours tenus par lord Liverpool, par M. Huskisson, tous deux membres du conseil du roi d’Angleterre, qui nous montrent que ces opinions sont partagées par des hommes d’État éclairés. Le dernier, après beaucoup d’autres considérations, s’exprime ainsi : « Si quelques uns de ceux qui m’entendent mettaient en question les droits de M. Watt (auquel on doit les grands perfectionnements des machines à vapeur) à être placé au premier rang des hommes de génie, je dois déclarer que c’est de leur part faute d’avoir suffisamment réfléchi sur ce sujet, et de connaître toute l’influence de la puissance chimique et mécanique sur la condition morale de la société. »

    Le même homme d’État dit plus loin : « Je ne puis m’empêcher, en jetant un regard sur la lutte où nous avons été engagés pendant un quart de siècle, de déclarer que, si nous l’avons terminée glorieusement, nous en sommes entièrement redevables aux nouvelles ressources que nous a créées le génie de Watt. J’ajouterai que, sans les améliorations mécaniques et scientifiques qui ont donné à l’industrie et à la richesse de ce pays un développement graduel, mais toujours certain, nous aurions été contraints de souscrire une paix humiliante avant les époques si connues où la victoire a favorisé nos armées.

    (Note de l’Auteur.)