Page:Say - Chailley - Nouveau dictionnaire d’économie politique, tome 2.djvu/105

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maisons furent soumises à une réglementation et à une étroite surveillance. En 1818, on régularisa officieusement l’exploitation de ces maisons, qui fut, par la loi du 19 juillet 1 820, transformée en ferme des jeux moyennant la redevance annuelle, au Trésor, d’une somme de 5 550 000 francs, plus une part à la ville sur le montant des bénéfices. A partir de 1837,1e jeu fut de nouveau interdit en France et, sauf la latitude excessive laissée à certains cercles, il ne se pratique plus légalement qu’à Monaco,

Toutefois, il existe encore deux catégories de jeu ; l’une tolérée par l’administration, l’autre autorisée par la loi, qui sont le jeu aux courses et le jeu à la Bourse. a. Jeux ou paris de courses. — Ces paris, d’origine anglaise, ont été organisés autrefois par les Betting- Banks, et leur forme la plus élémentaire est la cote proportionnelle des chevaux, c’est-à-dire l’évaluation des chances de gain pour chaque cheval engagé. Ils comprennent deux grandes divisions, le pari contre, côté des bookmakers, et le pari pour, côté du public, et ces divisions sont subdivisées elles-mêmes à l’infini par la variété des combinaisons : la cote, la poule ou le pari mutuel. Ces jeux, réservés autrefois à la seule classe des hommes de club et des grands propriétaires, se sont considérablement développés en se démocratisant. « Ils se sont multipliés, a dit un publicîste, au point de mettre en mouvement une somme d’environ un milliard de francs par an. Le seul pari mutuel, rien que sur trois hippodromes, a donné à l’assistance publique, en 1889, une somme de près de 7 millions de francs à raison d’un prélèvement de 2 p. 100 sur la valeur des enjeux ». Si le pari aux courses était seulement permis sur les hippodromes, il n’y aurait que demi-mal, l’opération n’étant pas alors à la portée de tout le monde. Mais les bookmakers ont imaginé de créer des agences, dans lesquelles le public est admis à jouer en permanence. Ces établissements ont obtenu un incroyable succès : on en a vu surgir de tous côtés, et en peu de temps une grande partie de Fépargne populaire y a été engloutie.

Les courses de chevaux ont été organisées dans l’intérêt de l’amélioration des races ; les jeux sur ces courses, au début simple accessoire, en sont devenus lebut principal. Gomme ces jeux, avec le développement qu’ils ont pris, sont infiniment plus préjudiciables au public, que les courses ne peuvent être profitables à l’élevage du cheval, il est hors de doute qu’en morale et en économie politique l’interdiction du jeu ne s’impose. b. Jeu de bourse (V. Marchés a terme). JEU ET LOTERIE

. La loterie. — Définition, historique, législation !.

— Les valeurs à lots. — Controverses écornas*. miques et législatives.

Faire appel au public, l’inviter à mettre une certaine somme dans une masse com^ mune, en laissant au hasard d’un tirage te soin de désigner les gagnants, c’est organiser une loterie. Or, l’article 410 du code pénal assimile la loterie au jeu. Comme le jeu, en effet, la loterie ne produit aucun bien, n’engendre aucune richesse, ne favorise aucun genre de commerce. Elle apporte, au contraire, un grave préjudice à la société en. soutirant l’épargne du travailleur et en détournant celui-ci du travail. «Il est superflu^ écrivait J.-B. Say, de faire sentir le tort que les loteries font à une nation, il suffit de dire que le législateur qui sanctionne un pareil impôt vote un certain nombre de vols et de suicides tous les ans ».

Les loteries, dès le xvr 3 siècle, prirent une 1 certaine vogue en Italie, à Gênes et à Venise surtout. Elles furent importées en France, à la suite des guerres de Naples et du Milanais. Peu de temps après, les abus et lm fraudes commises éveillent l’attention des parlements. Louis XIV, par une ordonnais de 1687, proscrit toute loterie ; mais, treize ans après, en 1700, la fameuse loterie royaï© est organisée, et son monopole régularisé as 31 décembre 1776. Au moment de la Révolution, la loterie royale était affermée et administrée par un receveur général. Les tirages avaient lieu deux fois par mois et rapportaient à l’État plusieurs millions de francs, La Convention maintient d’abord la loterie ; puis la supprime, le 25 brumaire an 11^ « comme un fléau inventé parle despotisme ». Mais, en présence de l’invasion des billets des loteries étrangères, on revint à la loterie d’État par un décret du 9 vendémaire an VL Enfin, le code pénal, article 410, inaugure un nouveau régime contre les loteries particulières, françaises ou étrangères ; puis la loi du 22 février 1829 supprime la loterie d’État elle-même dans vingt-huit départetement, tandis que celle de 1832 déclare mettre fin à l’existence de celles qui restent à dater du 1 er janvier 1836, ce qui fit perdre au budget un revenu annuel de 14 à 15 millions de francs. Ce fut finalement la loi du. 21 mai 1836 qui régla définitivement le sort des loteries de toute espèce, en France, e& exceptant seulement, sous certaines conditions, celles qui se proposent un but de bienfaisance ou l’encouragement des beaux-arts, La plupart des nations ont de même renoncé aux bénéfices fiscaux que pouvaient leur donner les loteries. Elles n’existent plus aujourd’hui que dans les États dont, sauf