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sur les ventes, au moment où l’acquéreur débourse son prix ; les droits sur les actes judiciaires et extrajudiciaires, au moment où le plaideur se met en frais ; les droits sur les boissons et autres denrées, après la vente faite ; l’impôt sur les voitures publiques, en même temps que le prix des places, etc. Des crédits sont accordés aux négociants en gros qui désirent attendre l’époque des rentrées pour se libérer. A peu près partout, on voit les administrations fiscales, dans leur propre intérêt, s’efforcer de satisfaire à la r>gle de commodité posée par Adam Smith. Il semble donc superflu d’insister à son sujet. ©. Quatrième règle d’économie dans la perception : modes divers d’exagération des frais de perception.

La quatrième règle prêche l’économie, l’économie dans les frais d’exploitation. Plus que toute autre industrie, les administrations fiscales doivent rechercher ce résultat,, car rien ne suscite de plus violentes protestations que l’excès des émoluments dupersonnel chargé du recouvrement des impôts. De tous temps, les traitants, partisans, financiers, fermiers, accusés de retenir au passage une trop grosse part des deniers de l’État, ont suscité la haine et la vengeance du peuple. L’histoire de tous les pays en fournit des exemples. Lorsque Franklin décrivait ironiquement dans son libelle : Règles pour faire d’un grand empire un petit, les causes de la chute des gouvernements, il disait : « Afin de rendre les taxes plus odieuses et mieux faites pour amener une résistance, assignez aux hommes chargés de la levée de l’impôt de larges salaires. Qu’ils vivent dans un luxe insultant sur la sueur et le sang d’un peuple laborieux ; ce peuple, qu’ils le fatiguent sans cesse, par des poursuites coûteuses... » L’excès des frais de perception résulte de diverses causes. D’abord, de celle dont nous venons de parler, exagération du nombre ou des émoluments des agents chargés du recouvrement. Puis, des entraves qu’Une assiette défectueuse des taxes peut apporter au développement de la richesse du pays. L’impôt maladroit coûte souvent au peuple le double, le triple de ce qu’il rapporte et va même jusqu’à anéantir les sources de la fortune nationale. Ainsi, au xvir 3 siècle, Vakavala en Espagne, droit de 10 p. 100 et de 15 p. 100 sur toutes les transactions commerciales, contribua, pour une grande part, à la décadence des manufactures du royaume 1 ,

. Voir à ce sujet une intéressante dissertation intitulée : 

« Des causes de la décadence de l’industrie et du commerce en Espagne depuis le règne de Philippe II » par Charles WJss. Strasbourg, 1839, in-8".

— 7 — IMPOT

En troisième lieu, les amendes, confiscations et autres peines infligées aux contrevenants risquent d’aggraver d’un poids très lourd le principal de l’impôt. Les taxes mal établies suscitent d’abord la tentation d’y contrevenir ; puis leur législation pénale s’appesantit sur ceux qui succombent à cette tentation. La gabelle, sous l’ancien régime, avec ses tarifs variant du simple au décuple de province à province, peuplait les prisons et les bagnes de délinquants de tout sexe et de tout âge.

Enfin, on doit compter comme frais de perception les gênes, les pertes de temps, dérangements, vexations qu’occasionne l’abus des formalités. Les visites réitérées des agents du fisc, leurs recensements et leurs recherches au domicile des contribuables, l’obligation de lever des expéditions, etc., constituent de véritables dépenses ; a tel point que l’Angleterre en chiffre aujourd’hui le montant, pour le restituer éventuellement à titre de drawback,

. Autres maximes déduites de l’expérience contemporaine.

Les quatre maximes d’Adam Smith, que nous venons de commenter, se résument, en définitive, dans les quatre mots essentiels suivants : justice, certitude, commodité, économie.

Sans doute, il serait préférable de s’en tenir à ces principes généraux, lesquels demeurent, en tous cas, primordiaux et classiques. Mais, depuis le commencement du siècle, des expériences ou des tentatives nouvelles ont soulevé des idées plus contingentes, plus actuelles, méritant, à titre secondaire tout au moins, de figurer dans la théorie de l’impôt. Une nouvelle série de maximes fiscales s’en dégage alors, parmi lesquelles nous choisirons seulement les suivantes.

. Le contact trop fréquent et trop direct entre les employés du fisc et le pufclic doit être évité. — Exemples à l’appui.

En premier lieu, l’impôt doit être organisé de manière à prévenir, autant que possible, les contacts trop directs et trop fréquents entre les contribuables et les employés du fisc. Les gouvernements comprennent, d’instinct, l’importance de cet axiome et s’efforcent, en général, de le mettre en pratique. Nous en trouvons de nombreuses preuves dans notre législation fiscale. Ainsi, pour établir les rôles annuels de l’impôt foncier, ce sont des répartiteurs, délégués des propriétaires, qui, seuls, se trouvent en rapport avec l’agent direct de l’Etat