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A consultes* ; Morbll-et, Mémoires. — Grimm, Correspondance. — Deloht, Hist. de la détention (Ses philosophes.

— Lacretellb, Hist. de la Convention. — Sciielle, l’abbé Morellet, Journal des Économistes, novembre 1890. MORELLY. — Écrivain politique, né a Vitry-le-François, vers la fin du règne de Louis XIV. — Bien que ses ouvrages aient acquis une certaine notoriété, sa vie est restée inconnue.

Il publia d’ab ord unEssai sur V esprit humain, in-12, 1743 ; un Essai sur le cœur humain, in- 12, 174o, œuvres de morale assez médiocres ; puis des ouvrages de politique et de sociologie : le Prince, ou Traité des qualités d’un grand roi, et le Système d’un sage gouvernement, 2 vol. in-12, 1751 ; le ’Naufrage des îles flottantes, ou la Basiliade, 2 vol. in-12, 1753 ; enfin, le Code de la nature ou le Véritable esprit de ses lois de tout temps négligé ou méconnu, 2 vol. in-12, 1755 et 1760. Ce dernier ouvrage qui a fait de notre temps la réputation de Morelly, a été, de son vivant, et jusqu’à la révolution, attribué à Diderot.

Le Gode de la nature, s’inspirant des œuvres de Platon, de Morus et de Campanella (voy. ces noms) est le point de départ du communisme moderne. On peut même affirmer que son auteur a, non seulement surpassé ses devanciers, mais encore au moins égalé ses continuateurs, Mably, Owen, Babœuf, Saint-Simon, Fourier, CabetetLouis Blanc, parla lucidité entraînante et l’enchaînement rigoureux des arguments qu’il rajeunit ou qu’il invente. « Ce qui distingue Morelly, dit A. Sudre, dans son Histoire du communisme, ce sont les efforts qu’il a faits pour asseoir son système sur une théorie morale et philosophique, pour réfuter les objections devant lesquelles ses prédécesseurs étaient restés muets ; enfin c’est la forme législative sous laquelle il a exposé le plan de la société régénérée. » Dans ses divers ouvrages de morale et de politique sociale, Morelly a posé en principe : 1° qu’il est incontestable que le motif ou la fin de toute action humaine est le désir d’être heureux ; que l’amour de nous-même nous pousse naturellement vers le bien, et que les passions, dont cet amour est la source, ne sont que des degrés de force qui nous en rapprochent ou nous en éloignent ; 2° qu’en fait de réforme, tout législateur qui n’améliore rien, gâte tout ; 3° que si la suprême puissance est unie, dans un être, à une grande sagesse, elle ne punit point, elle perfectionne ou anéantit.

Il en résulte que si l’homme est malheureux, c’est-à-dire mauvais, il faut trouver le moyen d’en détruire la cause première de cette condition, c’est-à-dire de rendre « le scélératisme » désormais impossible, et de ramener la créature à sa bonté instinctive, à sa probité naturelle.

« L’homme veut invinciblement être heureux, dit Morelly dans son Code de la nature ; mais son impuissance l’avertit sans cesse qu’il ne le peut être sans communication de secours. Il sait aussi qu’il est une infinité d’êtres possédés du même désir que lui et il est, à chaque instant convaincu que son bonheur dépend de celui des autres, et que la bienfaisance est le plus sûr moyen de sa félicité première. Tout semble lui crier : « Si tu veux être heureux, sois bienfaisant ! » Mais pourquoi sourd à ces conseils, ajoute l’écrivain socialiste, en écoute-t-il de diamétralement opposés ? C’est que la morale vulgaire, ainsi que la politique, a renversé et corrompu laplupart de ses idées, aussi bien que Tordre et la succession de ces idées. Tâchons donc de suivre et de reconnaître les véritables traces de la nature, et indiquons les vrais moyens de réparer tous ces désordres. » La recherche d’une société dans laquelle l’homme cesserait d’être méchant en cessant d’être malheureux, a été, en effet, dans tous les temps, le rêve de quelques sages philosophes, que révoltait plus particulièrement la vue des crimes de la société ; et il est à remarquer que presque tous ont cru trouver le remède à nos maux dans un état social dont la "constitution se rapprocherait de celle de la famille. Morelly a pensé comme eux. « Puisqu’il est constant, dit-il, que toute nation doit ses commencements à une ou plusieurs familles, elle a dû, au moins pendent quelque temps, conserver la forme du gouvernement paternel, et n’obéir qu’aux lois d’un sentiment d’affection que l’exemple du chef excite et fomente entre des frères et des proches. Douce autorité qui rend tous les biens communs et ne s’attribue elle-même la propriété de rien. Les lois éternelles de l’univers sont, en effet, que rien n’est à l’homme en particulier que ce qu’exigent ses besoins actuels ; ce qui lui suffit chaque jour pour le soutien ou l’agrément de sa durée. Le champ n’est point à celui qui le laboure, ni l’arbre à celui qui y cueille des fruits, il ne lui appartient, même des productions de sa propre industrie, que la portion dont il use. Le reste, ainsi que sa personne, est à l’humanité. »

Selon Morelly, la constitution actuelle de la propriété est la seule cause des désordres de la société : si ce vice n’existait plus, il serait impossible à l’homme d’être voleur, assassin ou conquérant. Le législateur aurait dû penser à l’union fraternelle des hommes et à l’égalité des droits. 11 aurait dû penser que « la famille consanguine, dans laquelle les ?