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OCTROIS

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OCTROIS

comptes annuels du receveur municipal seraient vérifiés par le sénéchal de la province. En résumé, les octrois des villes n’étaient autre chose que des aides (V. Financés de l’ancien rkgime, II, § 2) établies au profit de la commune, mais avec cette différence que pour celles-ci le roi, possédant un titre exécutoire, pouvait contraindre les villes à percevoir le droit. Le roi prélevait une part à son profit dans le produit de l’impôt et il rétablissait, soit de son plein gré après avis de la commune, soit sur la demande des habitants. Dans le premier cas, rétablissement n’était autre chose qu’un traité, ratifié et homologué par le roi en sa chambre des comptes ; dans le second, c’était une concession faite par des lettres patentes que les juges ordinaires étaient chargés d’entériner. L’institution ne pouvait manquer de se développer. Les villes avaient tout intérêt à demander l’établissement d’un octroi, car, moyennant une faible redevance sur les objets de consommation, elles se trouvaient à la tête de revenus assez considérables et surtout parfaitement sûrs. D’un autre côté, la royauté voyait les ressources municipales augmenter, et elle n’avait garde d’empêcher ce développement qui pouvait lui être très utile dans les moments, malheureusement trop fréquents, où elle était obligée de recourir au crédit de ses sujets. Une entente tacite s’établit donc et les octrois continuèrent à se multiplier sous les successeurs de Charles V, en sorte qu’au xvii siècle, il y avait bien peu de villes importantes où la taxe ne fût pas établie. . Ressources tirées des octrois sous Louis XIV. Règlements de Colbert.

Lorsque Louis XIV monta sur le trône, les finances du royaume étaient dans un état de délabrement voisin de la ruine. On employa dans les premières années du règne une infinité de petites ressources plus à charge aux peuples qu’utiles à l’État et lorsqu’en 1647 le surintendant L’Émery en vint à tirer parti des octrois des villes, il envisagea cette branche de revenus plutôt en financier qu’en administrateur. Par une déclaration du 21 décembre 4647 vérifiée dans les cours des aides, le roi ordonna que tous les deniers communs d’octroi et autres qui se levaient au profit des villes et communautés seraient portés à l’épargne à commencer du 1 er janvier 4648 et il fut permis aux maires et échevins de lever ces mêmes droits par doublement. Les troubles de la Fronde, qui suivirent de près cette déclaration, mirent obstacle à son exécution ; lorsque le calme fut rétabli, on prit le parti de ne point augmenter la charge des communes. Le 28 juin 4653 un arrêt du Conseil intervint et décida que la première moitié seulement des octrois alors existants serait prélevée au profit du trésor royal et portée à l’épargne. Mais il fallait connaître le produit de l’impôt. Les intendants qui furent envoyés en province pour recueillir des renseignements, ne purent réussir dans leurs recherches. En effet les officiers municipaux s’empressaient de faire des baux à vil prix à des intermédiaires, ou bien ils mettaient l’oclroi en régie et son produit restait inconnu. On crut bien faire en employant l’intimidation, mais le moyen ne réussit pas et on se décida, le 6 septembre 1657, à adjuger à des traitants la première moitié des octrois. Le moment avait été mal choisi. Foucquet n’avait retiré de l’adjudication qu’une somme dérisoire ; aussi, un mois après la chute du surintendant, la résiliation de l’aliénation fut décidée (novembre 1661). Il fallait encore remettre un peu d’ordre dans l’administration financière. Colbert prit le parti de codifier les dispositions comprises dans les arrêts du Conseil de 4653 et J655 et, à cet effet, il fit rendre la déclaration du 28 novembre 4 66 1. Le prélèvement de la première moitié des octrois au profit du roi était maintenu, les octrois étaient prorogés à perpétuité et, pour éviter toute contestation avec les officiers municipaux, on autorisait les fermiers du roi à se mettre en possession de l’impôt et à exiger la remise de tous les titres relatifs à sa perception. Un édit du mois de novembre 1 663 renouvela ces dispositions et malgré les résistances des cours des aides et des chambres des comptes, qui ne l’enregistrèrent qu’à la suite d’un très exprès commandement du roi, les fermiers demeurèrent en paisible possession des octrois municipaux.

. Les successeurs de Colbert. — Augmentations des droits. — Vœux du public.

Colbert avait procuré un double avantage au roi. Il avait augmenté son revenu et s’était mis en état de connaître par la suite la valeur d’un produit dont il pouvait tirer au besoin les plus grandes ressources. En outre, les dettes des communes se trouvaient liquidées et l’ordre était rétabli dans les finances. Malheureusement, ses successeurs n’eurent garde de suivre son exemple. Le désordre se glissa de nouveau dans l’administration et, pour faire face aux besoins croissants du Trésor, on reprit les affaires extraordinaires. Les officiers municipaux devinrent à la nomination du roi et il en résulta une nouvelle charge pour les communes. Celles-ci, en effet, durent payer une partie des gages des nouveaux fonctionnaires et pour couvrir les dépenses on accrut les droits d’octroi. Le 1 er no-