Page:Say - Lettres à M. Malthus sur l’économie politique et la stagnation du commerce.djvu/115

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Pourquoi les sauvages du nouveau monde, dont la précaire subsistance repose sur le hasard d’une flèche, refusent-ils de bâtir des villages, d’enclore des terrains et de les cultiver ? c’est que ce genre de vie exige un travail trop assidu, trop pénible. Ils ont tort ; ils calculent mal, car les privations qu’ils endurent sont pires de beaucoup que les gênes que la vie sociale bien entendue leur imposerait. Mais, si cette vie sociale était une galère où, en ramant à tour de bras pendant seize heures sur vingt-quatre, ils ne parvinssent à produire qu’un morceau de pain insuffisant pour les nourrir, en vérité ils seraient excusables de ne pas aimer la vie sociale. Or tout ce qui rend plus pénible la situation du producteur, de l’homme essentiel des sociétés, tend à détruire le principe de vie du corps social ; à rapprocher un peuple civilisé d’un peuple sauvage ; à amener un ordre de choses où l’on produit moins et où l’on consomme moins ; à détruire la