Page:Say - Traité d’économie politique.djvu/114

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
113
DE LA PRODUCTION DES RICHESSES.

répète point. On voit que l’accumulation, présentée sous ses véritables traits, n’a rien qui doive la rendre odieuse ; on sentira tout à l’heure au contraire les bons effets dont elle est suivie.

Je prie aussi de remarquer que la forme sous laquelle la valeur épargnée se trouve être épargnée et réemployée, ne change rien au fond de la question ; elle l’est avec plus ou moins d’avantage, selon l’intelligence et la position de l’entrepreneur. Rien ne s’oppose à ce que cette portion de capital ait été accumulée sans avoir été un seul instant sous la forme de monnaie d’argent. Un des produits épargnés peut avoir été planté ou semé avant d’avoir subi aucun échange ; le bois, qui aurait inutilement chauffé des appartemens superflus, peut se montrer en palissades, s’élever en charpente, et, d’une portion de revenu qu’il était au moment de la coupe, devenir un capital après avoir été employé.

La nature des besoins de chaque nation, sa position géographique, et le génie de ses habitans, déterminent communément la forme sous laquelle s’amassent ses capitaux. La plus grande partie des accumulations d’une société naissante consiste en constructions, en outils d’agriculture, en bestiaux, en améliorations de son fonds de terre ; la plupart de celles d’une nation manufacturière consistent en matières brutes, ou qui sont dans un état plus ou moins ouvragé, entre les mains de ses fabricans. Ses capitaux se composent encore des usines et des machines propres à façonner les produits.

Chez une nation principalement commerçante, la plus grande partie des capitaux accumulés est en marchandises brutes ou manufacturées que les négocians ont achetées, et qu’ils se proposent de revendre. Les navires et autres bâtimens de commerce, les magasins, les chars, les chevaux, font aussi une partie importante des capitaux d’une telle nation.

Une nation qui cultive à la fois l’industrie agricole, l’industrie manufacturière et l’industrie commerciale, voit son capital composé de produits de toutes ces différentes sortes, de cette masse de provisions de tout genre que nous voyons actuellement entre les mains des peuples policés, et qui, employés avec intelligence, sont perpétuellement entretenus, et même augmentés, malgré l’immense consommation qui s’en fait, pourvu que l’industrie de ces peuples produise plus de valeurs que leur consommation n’en détruit.

Ce n’est point à dire que chaque nation ait précisément produit et mis en réserve les choses qui composent actuellement son capital ; elle a pu mettre en réserve des valeurs quelconques, qui, par la voie des transmu-