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LIVRE TROISIÈME. — CHAPITRE IX.

hommes industrieux qu’elle contient, ont cependant au plus haut degré une qualité qu’Arthur Young, homme savant en économie politique, réclame dans un impôt, celle d’être payés avec facilité[1]. Quand une nation a le malheur d’avoir beaucoup d’impôts, comme en cette matière on n’a que le choix des inconvéniens, peut-être doit-on tolérer ceux qui portent modérément sur les capitaux.

Les impôts sur les procédures, et en général tous les frais qu’on paie aux gens de loi, sont pris de même sur les capitaux ; car on ne plaide pas suivant le revenu qu’on a, mais suivant les circonstances où l’on se trouve jeté, les intérêts de famille où l’on est impliqué, et l’imperfection des lois.

Les confiscations portent également sur les capitaux.

L’impôt n’influe pas sur la production seulement en altérant une de ses sources, les capitaux ; il agit encore à la manière des amendes, en punissant certaines productions et certaines consommations. Tous les impôts qui portent sur l’industrie, comme les patentes ou permissions d’exercer une industrie, sont dans ce cas-là ; mais lorsqu’ils sont modérés, l’industrie surmonte facilement l’obstacle qu’ils lui présentent.

L’industrie n’est pas seulement frappée par les impôts qui lui sont directement demandés, elle l’est encore par ceux qui portent sur la consommation des denrées dont elle fait usage.

En général, les produits de première nécessité sont ceux qui sont consommés reproductivement, et les impôts qui les défavorisent, nuisent à la reproduction. Cela est plus généralement vrai encore des matières premières des arts, qui ne peuvent être consommées que reproductivement. Lorsqu’on met un droit excessif sur le coton, on nuit à la production de tous les tissus dont cette matière est la base[2].

  1. C’est par cette raison que le droit d’enregistrement a pu être porté si haut en France. Peut-être que, s’il était baissé, il rapporterait au fisc la même somme ; et la nation, outre que ses capitaux seraient moins entamés, y gagnerait une plus libre circulation de propriétés.
  2. En Angleterre, même en France, afin d’encourager les manufactures, on donne des primes pour l’importation de certaines matières brutes. C’est tomber dans un excès opposé. D’après le même principe, loin de faire payer une contribution foncière, on devrait payer une gratification à ceux qui ont la bonté de cultiver la terre ; car l’industrie agricole fournit aussi des matières brutes à la plupart des manufactures, et notamment le blé, qui, par l’élaboration des ouvriers, est transformé en marchandises d’une valeur supérieure aux valeurs consommées. Les droits de douane, sur quelque matière que ce soit, sont aussi équitables que l’impôt foncier ; mais comme l’un et l’autre ne peuvent produire que du mal, le mal est d’autant plus petit, que l’impôt est plus léger.