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DE LA CONSOMMATION DES RICHESSES.

Tantôt il frappe, non la marchandise elle-même, mais l’acquittement de son prix, comme il le fait par le timbre des quittances et des effets de commerce.

Toutes ces manières de lever les contributions les rangent dans la classe des contributions indirectes, parce que la demande n’en est adressée à personne directement, mais au produit, à la marchandise frappée de l’impôt[1].

On conçoit facilement que tel revenu qui pourrait n’être pas atteint par un de ces genres de contributions, l’est par un autre, et que c’est un grand acheminement à l’équitable répartition des charges publiques, que la multiplicité des formes sous lesquelles elles se présentent, pourvu toutefois que chacune en particulier soit maintenue dans les bornes d’une certaine modération.

Chacune de ces manières d’asseoir l’impôt, outre l’inconvénient général d’appliquer une partie des produits de la société à des usages peu favorables à son bonheur et à ses reproductions, a d’autres inconvéniens et des avantages qui lui sont propres. L’impôt direct, par exemple, coûte moins de frais de perception, mais il s’acquitte péniblement et entraîne des contraintes odieuses. Il frappe les revenus très-inéquitablement. Un riche négociant qui paie une patente de six cents francs, peut gagner cent mille francs par an ; un petit boutiquier dont les gains ne peuvent excéder deux mille écus, paie une patente qui ne peut être moindre de cent francs. Le revenu d’un propriétaire foncier, déjà frappé par la contribution foncière, l’est une seconde fois par la contribution mobilière ; tandis que le revenu du capitaliste, frappé par cette dernière contribution, ne l’est qu’une seule fois.

Les contributions indirectes ont le mérite d’être acquittées plus facilement, et de paraître moins vexatoires. Toute contribution se paie avec répugnance, parce que le prix de cette dette, la protection du gouvernement, est un avantage négatif dont on est peu touché. Un gouvernement est précieux plutôt par les maux dont il préserve, que par les jouissances qu’il procure. Mais en payant un impôt sur les denrées, on ne croit pas

  1. Et non parce qu’elles atteignent indirectement le contribuable ; car, si elles tiraient leur dénomination de cette dernière circonstance, il faudrait donner le même nom à des contributions très-directes, comme, par exemple, à l’impôt des patentes, qui tombe en partie indirectement sur le consommateur des produits dont s’occupe le patenté.