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DE LA CONSOMMATION DES RICHESSES.

l’impôt, accru d’un intérêt composé dont le fisc n’a point profité.

L’impôt en nature prélève, sur le terrain même, une partie de la récolte au profit du trésor public.

Il a cela de bon, qu’il ne demande au cultivateur qu’une valeur qu’il a, et sous la forme même où il la possède. La Belgique, après avoir été conquise par les Français, s’est trouvée, à certaines époques, hors d’état de payer ses contributions, quoiqu’elle eût de belles récoltes. La guerre et les défenses d’exporter l’empêchaient de vendre, et le fisc voulait qu’elle vendît, puisqu’il demandait de l’argent : elle aurait facilement supporté les charges publiques, si le gouvernement avait levé en nature les produits qu’il lui demandait.

Il a cela de bon, que le gouvernement est aussi intéressé que le cultivateur aux bonnes récoltes, et par conséquent à favoriser l’agriculture ; et peut-être l’impôt en nature, perçu à la Chine, est-il l’origine de cette protection spéciale que le gouvernement de ce pays accorde au premier des arts industriels. Mais tous les revenus ne méritent-ils pas la même protection ? Ne sont-ils pas tous des sources où les gouvernemens puisent leurs subsides ? Les gouvernemens ne sont-ils pas également intéressés à protéger d’autres industries qu’ils écrasent ?

Il a cela de bon, que sa perception n’admet rien d’arbitraire ni d’injuste : le particulier, une fois sa récolte faite, sait ce qu’il est tenu de payer ; le fisc, ce qu’il est en droit de réclamer. Cet impôt paraît le plus équitable de tous ; il n’y en a pas qui le soit moins : il ne tient nul compte des avances faites par le producteur ; il se proportionne au revenu brut, et non au revenu net.

Deux agriculteurs propriétaires ont des cultures différentes : l’un cultive de médiocres terres à blé ; ses frais de culture se montent, année commune, à 8,000 francs ; le produit brut de ses terres est de 12,000 francs : il a donc 4,000 francs de revenu net.

Son voisin a des prairies ou des bois qui rendent brut, tous les ans, 12,000 francs également, mais qui ne lui coûtent d’entretien que 2,000 francs. C’est donc, année commune, 10,000 francs de revenu qui lui restent.

Une loi commande qu’on lève en nature un douzième des fruits de la terre, quels qu’ils soient. On enlève en conséquence, au premier, des gerbes de blé pour une valeur de 1,000 francs ; et au second, des bottes de foin, des bestiaux ou du bois, pour une valeur de 1,000 francs égale-