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PRÉLIMINAIRE.

toutes manières, l’observation, quand nous ne pouvons avoir recours à des expériences faites exprès, est nécessaire pour confirmer ce que l’analyse a pu nous apprendre.

Ces principes, qui m’ont guidé, m’aideront à distinguer deux sciences qu’on a presque toujours confondues : l’économie politique, qui est une science expérimentale, et la statistique, qui n’est qu’une science descriptive.

L’économie politique, telle qu’on l’étudie à présent, est tout entière fondée sur des faits ; car la nature des choses est un fait, aussi bien que l’événement qui en résulte. Les phénomènes dont elle cherche à faire connaître les causes et les résultats, peuvent être considérés ou comme des faits généraux et constans qui sont toujours les mêmes dans tous les cas semblables, ou comme des faits particuliers qui arrivent bien aussi en vertu de lois générales, mais où plusieurs lois agissent à la fois et se modifient l’une par l’autre sans se détruire ; comme dans les jets-d’eau de nos jardins, où l’on voit les lois de la pesanteur modifiées par celles de l’équilibre, sans pour cela cesser d’exister. La science ne peut prétendre à faire connaître toutes ces modifications qui se renouvellent chaque jour et varient à l’infini ; mais elle en expose les lois générales et les éclaircit par des exemples dont chaque lecteur peut constater la réalité.

La statistique ne nous fait connaître que les faits arrivés ; elle expose l’état des productions et des consommations d’un lieu particulier, à une époque désignée, de même que l’état de sa population, de ses forces, de ses richesses, des actes ordinaires qui s’y passent et qui sont susceptibles d’énumération. C’est une description très-détaillée. Elle peut plaire à la curiosité, mais elle ne la satisfait pas utilement quand elle n’indique pas l’origine et les conséquences des faits qu’elle consigne ; et lorsqu’elle en montre l’origine et les conséquences, elle devient de l’économie politique. C’est sans doute la raison pour