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D’UNE CHATTE ANGLAISE.

convenantes sur Puff, et qui m’apprit que la véritable devise de l’Angleterre était : Dieu et mon Droit… conjugal ! Une nuit, j’entendis dans la rue la voix du Chat français. Personne ne pouvait nous voir : je grimpai par la cheminée, et, parvenue en haut de la maison, je lui criai : « À la gouttière ! » Cette réponse lui donna des ailes, il fut auprès de moi en un clin d’œil. Croiriez-vous que ce Chat français eut l’inconvenante audace de s’autoriser de ma petite exclamation pour me dire : « Viens dans mes pattes ! » Il osa tutoyer, sans autre forme de procès, une Chatte de distinction. Je le regardai froidement, et pour lui donner une leçon, je lui dis que j’appartenais à la Société de Tempérance.

— Je vois, mon cher, lui dis-je à votre accent et au relâchement de vos maximes, que vous êtes, comme tous les Chats catholiques, disposé à rire et à faire mille ridiculités, en vous croyant quitte pour un peu de repentir ; mais en Angleterre, nous avons plus de moralité : nous mettons partout de la respectability, même dans nos plaisirs.

Ce jeune Chat, frappé par la majesté du cant anglais, m’écoutait avec une sorte d’attention qui me donna l’espoir d’en faire un Chat protestant. Il me dit alors dans le plus beau langage qu’il ferait tout ce que je voudrais, pourvu qu’il lui fût permis de m’adorer. Je le regardais sans pouvoir répondre, car ses yeux, very beautiful, splendid, brillaient comme des étoiles, ils éclairaient la nuit. Mon silence l’enhardit, et il s’écria : — Chère Minette !