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LES AVENTURES

« J’aime le mouvement, j’ai des ailes pour voler, répétait-il avec mélancolie. Les Papillons sont bien à plaindre ! Je ne veux plus rien voir de ce qui tient à la terre. Je veux oublier ces fleurs immobiles, ces rencontres m’ont profondément attristé ! Cette vie m’est odieuse… »

Et je le vis s’élancer vers le fleuve comme s’il eut été emporté par une résolution soudaine ! Un funeste pressentiment traversa mon cerveau… « Grand Dieu ! m’écriai-je, voudrait-il mourir ! » et j’arrivai éperdue au bord de l’eau que je savais profonde en cet endroit.

Mais déjà tout était calme, et rien ne paraissait à la surface que les feuilles flottantes du Nénuphar autour desquelles des Araignées aquatiques décrivaient des cercles bizarres.

Vous l’avouerai-je ? mon sang se glaça !

Folle que j’étais, j’en fus quitte, Dieu merci, pour la peur ; une touffe de Roseaux me l’avait caché.

« Bon Dieu, me criait-il d’une voix railleuse, que fais-tu là depuis si longtemps, ma sage gouvernante ? Prends-tu le Rhin pour un miroir, ou bien songerais-tu à te noyer ? Viens donc de ce côté ; et si tu as quelque affection pour moi, sois heureuse, car j’ai trouvé le bonheur ! J’aime enfin, et cette fois pour toujours… non plus une triste fleur, attachée au sol et condamnée à la terre, mais bien un trésor, une perle, un diamant, une fille de l’air, une fleur vivante et animée qui a des ailes enfin, quatre ailes minces et transparentes, enrichies