Page:Scènes de la vie privée et publique des animaux, tome 1.djvu/229

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
133
D’UN PAPILLON.

en des termes qu’un artiste n’eût pas désavoués. « J’aime tout ce qui est beau ! » s’écria-t-il.

Les esprits légers aiment toujours, c’est pour eux un état permanent et nécessaire, c’est seulement l’objet qui change ; s’ils oublient, c’est pour remplacer. Un peu plus loin, il salua la statue de Guttemberg quand je lui eus dit que ce bronze de David était un hommage rendu tout récemment à l’inventeur de l’imprimerie.

Un peu plus loin encore, il s’inclina devant l’image de Kléber. « Ma bonne gouvernante, me dit-il, si je n’étais Papillon, j’aurais été artiste, j’aurais élevé de beaux monuments, j’aurais fait de beaux livres ou de belles statues, ou bien je serais devenu un héros et je serais mort glorieusement. »

Je profitai de l’occasion pour lui apprendre qu’il n’est pas donné à tous les héros de mourir en combattant, et que Kléber mourut assassiné.

Le jour venait, il fallut songer à trouver un asile ; j’aperçus heureusement une fenêtre qui s’ouvrait dans une salle immense que je reconnus pour appartenir à la bibliothèque de la ville. Elle était pleine de livres et d’objets précieux. Nous entrâmes sans crainte, car, à Strasbourg comme partout, ces salles de la science sont toujours vides.

Son attention fut attirée par un bronze antique de la plus grande beauté. Il loua avec enthousiasme les lignes nobles et sévères de cette imposante Minerve, et je crus un instant qu’il allait écouter les conseils d’airain de