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LES ANIMAUX

conseils : plusieurs d’entre nous se sont mis à penser. Ils rêvent même de poésie, arts, science ; que sais-je encore ? Ces fous s’imaginent que pour découvrir tout cela, il suffit de s’éloigner du naturel et de notre instinct si sublime quoi qu’on en dise. — Le Rossignol chantait ; un Âne s’est donné une mission d’inventer la musique et de la mettre à la portée des Chats. La civilisation les déborde. — Dieu, qui veut les arrêter sans doute, vient de leur envoyer une idée terrible : les Animaux, vos amis, vos frères, sont dégoûtés de mourir de leur belle mort ; ils ont résolu de fonder une médecine, une chirurgie animale. Déjà ils se sont mis à l’œuvre. Voyez : je n’ai plus que la peau et les os, et je sors de me commander des béquilles. »

Le Renard, qui se trouve de rédaction ce jour-là, propose au blessé de se rafraîchir. Celui-ci accepte ; alors le Renard lui fait apporter une plume et de l’encre, et le prie d’écrire sa mésaventure pour l’édification de la postérité. Le Chien obéit par habitude, seulement au lieu d’écrire il dicte :

« Je suis juste, dit-il, et ne veux rien cacher. Il y avait depuis longtemps, parmi les Hommes, certains individus appelés, je crois,… vétérinaires, et qui, en conscience, nous abîmaient. Nous n’étions pas plutôt entre leurs griffes, qu’ils nous saignaient, purgeaient, repurgeaient, et surtout qu’ils nous mettaient à la diète. Je me plains