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LES ANIMAUX

il n’y avait rien à répliquer. Le grave Requin sentit qu’il fallait effacer jusqu’au dernier souvenir de sa défaite : « Messieurs, dit-il, puisque le malade ne nous permet pas l’opération pour aujourd’hui, et qu’il faut ajourner les considérations pratiques, permettez-moi d’aborder un moment les considérations morales de notre sujet… »

— Morales !… On vous flattait, mon cher.

« Vous trouvez ? c’est possible ; mais j’allais beaucoup mieux, je vous le jure. J’entendis très-distinctement le petit sermon que voici en abrégé : « Chers élèves : Le médecin philosophe tient en quelque chose de la nature de Dieu ; notre profession est un sacerdoce ; vous le savez, dans la première antiquité, l’art de guérir était exercé par des prêtres ; c’est qu’il exige plus que des talents, il veut des vertus… »

« — Oh ! oh ! firent quelques étudiants de première année.

« — La médecine redeviendra un sacerdoce, ou, si vous aimez mieux, une fonction sociale ; les médecins présideront à l’hygiène publique ; moins il y aura de malades, plus la médecine sera honorée, récompensée. Ce monde, pour arriver au progrès, doit donc être renversé. — Aussi bien, mes frères, hâtons de tous nos efforts l’adoption de cette doctrine de la plus grande rétribution selon la plus petite clientèle : car, évidemment, les malades s’en