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VOYAGE D’UN LION D’AFRIQUE

pieds ? Savez-vous seulement ce qu’est un pédicure ? Vous n’avez pas de sous-pieds, et vous venez me demander pourquoi l’on nous appelle des Lions ! Mais je vais vous le dire : nous sommes des Laiannes, parce que nous montons à Cheval, que nous écrivons des romans, que nous exagérons les modes, que nous marchons d’une certaine manière, et que nous sommes les meilleurs enfants du monde. Vous n’avez pas de tailleur à payer ?

« — Non, dit le prince du désert.

« — Eh bien ! qu’y a-t-il de commun entre nous ? Savez-vous mener un tilbury ?

« — Non.

« — Ainsi vous voyez que ce qui fait notre mérite est tout à fait contraire à vos traits caractéristiques. Savez-vous le whist ? Connaissez-vous le jockey’s-club ?

« — Non, dit l’ambassadeur.

« — Eh bien ! vous voyez, mon cher, le whist et le club, voilà les deux pivots de notre existence. Nous sommes doux comme des Moutons, et vous êtes très-peu endurants.

« — Nierez-vous aussi que vous ne m’ayez fait enfermer ? dit le prince que tant de politesse impatientait.

« — J’aurais voulu vous faire enfermer que je ne l’aurais pas pu, répondit le faux Lion en s’inclinant jusqu’à terre. Je ne suis point le Gouvernement.

« — Et pourquoi le Gouvernement aurait-il fait enfermer Son Altesse ? dis-je à mon tour.