Tes injures, tes cris, ne peuvent m'irriter,
Je veux un ennemi qui puisse résister.
Je ne veux point de femme, et quand j'en voudrais une,
J'en choisirais une autre, et d'une autre fortune.
Pour me la faire prendre, il fallait me prier, [275]
Non pas me quereller, non pas m'injurier.
Je ne fais rien par force, et fais tout par prière ;
Aux humbles je suis doux ; aux fiers, j'ai l'âme fière.
Et puis vos déplaisirs me seront imputés :
Prenez, prenez-vous en à vos témérités. [280]
J'ai dit sur le sujet tout ce que je veux dire ;
Pensez-y mûrement, et que je me retire.
Tu ne t'en iras pas sans me faire raison.
La bravoure sied mal à tout homme grison.
D'autres bras que les miens vengeront mon offense. [285]
Je m'en vais de ce pas songer à ma défense.
Ha ! Perfide, sans foi.
Ne vous fâchez pas tant,
Pour remède à vos maux, j'ai de l'argent comptant.
Adieu bel Ange en pleurs. Et vous vieillard colère,
Ne vous pressez pas tant de devenir beau-père. [290]
Il s'en va.
Ha, si mon bras m'épargne, insolent ravisseur
Je préfère ses coups à ta fausse douceur.
M'ayant ôté l'honneur en ma fille ravie,
Pour allonger mes maux me laisses-tu la vie ?
Viens, viens, finir mes jours, ils n'ont que trop duré, [295]
Si j'avais moins vécu j'aurais moins enduré.
Mais différons encor cet extrême remède,
Rappelons cependant Dom Pedre dans Tolède.
Ce fils que Dieu me laisse, est jeune, et courageux,
Il saura bien venger un mépris outrageux. [300]