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Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/218

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Vous vous trompez,

Les sens ne sont ici que trop bien occupés ; [1020]

Ce cabinet est plein de peintures fort belles,

Qui divertissent bien.

LÉONOR

J'en ai de telles quelles.

HÉLÈNE

Sont-elles d'Italie ? Et sont-ce originaux ?

Vous avez un portrait pourtant pue je tiens faux,

Qui fut longtemps à moi, mais je m'en suis défaite : [1025]

Comment avez-vous fait cette mauvaise emplette ?

LÉONOR

Vous y connaissez-vous ?

HÉLÈNE

Je m'y connais fort bien.

LÉONOR

Ne vous y trompez plus, vous n'y connaissez rien,

Le portrait est de prix, et vaut bien qu'on le garde,

Une âme généreuse à la bonté regarde, [1030]

Ne fut-il que passable, étant sans intérêt,

Je l'aimerai toujours à cause qu'il me plaît :

Aimer pour le profit, c'est être mercenaire.

HÉLÈNE

Courir sur le marché d'un autre, est-ce bien faire ?

LÉONOR

Courir après l'argent, ce n'est pas faire mieux. [1035]

HÉLÈNE

C'est avoir le goût bon.

LÉONOR

Et de fort mauvais yeux

De mépriser la forme, et choisir la matière.

HÉLÈNE

Votre portrait en l'un et l'autre ne vaut guère.

LÉONOR

Peut-être en avez-vous tâté, car autrement

Vous ne parleriez pas de lui si hardiment. [1040]

HÉLÈNE