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Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/423

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Scène V.

ALFONSE, LÉONORE, MARINE, MARC-ANTOINE.
alfonse, qui rentre sur le théatre avec Marc-Antoine.

Léonore, il est tems que j’apprenne mon sort,
Et que vous me donniez, ou la vie ou la mort :
Je vous ai déclaré que pour vous je soupire,
Vous ne me dites rien quand j’ose vous le dire ;
Ce silence à mon feu ne promet rien de bon,
Et quand vous m’aimeriez, je puis croire que non.
Je sais que la beauté, quand elle est peu commune,
Peut soumettre à ses pieds la plus haute fortune ;
Et quand bien je serois riche et de qualité,
Que mon amour seroit une témérité ;
Je ne vous dis donc point que le bien de mon pére
Me pourroit élever au bonheur que j’espére ;
Si par-là seulement on vous peut espérer,
Les grands rois seulement peuvent vous adorer.
Mon amour veut tenir le vôtre de soi-même ;
Je crois vous dire assez, disant que je vous aime,
Et par le simple aveu de mon affection,
Que je mérite assez votre compassion ;
Donnez-moi donc la mort, ou bien de l’espérance.

léonore.

Consultez là-dessus votre persévérance :
C’est de-là seulement, je le dis tout de bon,
Que vous pourrez savoir si je vous aime ou non :
Mais le tems seulement me la fera connoître.

d. alfonse.

Je puis donc espérer ?

léonore.

                                    Cela pourroit bien être,
Marine allons-nous-en.