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Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/602

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mon coeur n'ait rien tant à craindre que moy

   Dans le dessein que j'ay de me battre avec toy;
   Mais le temps que je perds à ma plainte frivolle,
   Se peut mieux employer à tenir ma parolle.



Scène VI


OROSMANE, ELISE.


ELISE.

   Amintas, genereux mesme à ses ennemis,
   Te tirera des fers comme il te l'a promis.
   Mais, cher Prince, il est temps qu'Elise impatiente,
   Cesse enfin d'ignorer ta fortune inconstante,
   Et pourquoy si long-temps, & si proche de moy,
   Le faux nom d'Orosmane abusa de ma foy.

OROSMANE.

   Quand la parfaite Elise aussi juste que belle,
   M'eut appris les desseins de son Pere infidelle,
   Qui sur de specieux, mais frivoles sujets,
   Avoit fait contre moy revolter mes Sujets,
   Et qui pour mieux cacher où marchoit son Armée,
   En menaçoit les bords de la Grece allarmée,
   Elle vit que mon coeur ne pouvant la quitter,
   Pour la premiere fois osa luy resister,
   J'abandonnois mon Thrône à vostre injuste Pere,
   Vostre coeur genereux s'en mettoit en colere,
   La crainte de languir un moment loin de vous,
   Me faisoit mépriser cét obligeant courroux:
   Mais vos yeux se servant de toute leur puissance,
   Il se fallut resoudre à cette longue absence,
   Courir au moins pressé de deux maux dangereux.
   Sur la mer, mon destin ne fut pas plus heureux,
   Je fus battu des vents, & dans la Cilicie,
   J'eus à tous mes desseins la fortune ennemie.

ELISE.

   Je sçay que la fortune accablant la valeur,
   En un dernier combat vous eustes du m