Aller au contenu

Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/61

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Blanche.

Quand vous mariez-vous ? Aujourd’hui.

Olivarès, à part.

Quand vous mariez-vous ? Aujourd’hui.L’infidelle !

Louize, à Olivarès.

Il n’est pas dans le monde une plus fourbe qu’elle.

Olivarès.

Fourbissime.

Stefanie.

Fourbissime.Et dom Blaize a signé le contrat ?

Blanche.

Dès long-tems.

Stefanie.

Dès long-tems.Ô bon dieu ! pardonne au scélérat.
Il n’en peut accomplir la principale clause,
Ni vous donner la main.

Blanche.

Ni vous donner la main.Puisque tout s’y dispose,
Que mon pére le veut, que j’en suis convenu,
Et que c’est pour cela que dom Blaize est venu,
Qui l’en peut empêcher ?

Stefanie.

Qui l’en peut empêcher ? Hélas ! c’est moi, madame !
Moi qui l’ai fait régner dès long-tems dans mon ame,
Sa qualité, son bien, ses sermens et ses pleurs,
Son langage flatteur et ses feintes douleurs.
Ma jeunesse crédule et mon ame trop tendre,
Ma folle vanité trop aisée à surprendre,
Enfin tout ce que peut d’ennemis assembler
La rigueur d’un destin qui vouloit m’accabler,
Favorisa si bien les desseins de ce traître,
Que je ne puis l’haïr, quelqu’ingrat qu’il puisse être,
Qu’il obtint… mais, hélas ! ma rougeur et mes pleurs
Vous déclarent assez jusqu’où vont mes malheurs ;
Mais aussi je vous suis encor si peu connue,
Que vous pourriez douter si je suis ingénue,
Et sans me faire tort, mettre en doute ma foi,
Si j’étois sans témoins qui parlassent pour moi.
Deux enfans malheureux d’un infidéle pére,
Joindront leur faible voix à celle de leur mére,