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Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/610

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urroux?

   Est-ce avoir merité vostre haine mortelle,
   Que de m'avoir aymée & de m'estre fidelle?
   O Prince! qui sans moy serois moins malheureux;
   A quoy donc nous reserve un destin rigoureux?
   Et d'un heureux moment de joye inesperée,
   D'un espoir aussi vain que de peu de durée,
   A-t'il voulu flatter ceux qu'il vouloit punir;
   Mon cher Alcandre enfin, qu'allons-nous devenir.



Scène V


OROSMANE, ELISE.


OROSMANE.

   Il veut unir, Madame, un Amant temeraire,
   Un insensé, qui crût meriter de vous plaire;
   Dont la vie est funeste au bonheur de vos jours.
   Mais finit-il des miens le long & triste cours,
   Puis que nos ennemis souffrent que je vous voye?
   Tout rigoureux qu'ils sont ils me comblent de joye.

ELISE.

   Que tu les connois mal, ces communs ennemis,
   Quand tu leur sçais bon gré de ce qu'ils t'ont permis.
   La faveur dont tu crois leur estre redevable,
   De leurs méchancetez est la plus redoutable,
   Et tu le vas bien voir par les rudes effets
   Des maux qu'elle va joindre aux maux qu'on nous a faits.
   Te le diray-je? on veut qu'Orosmane choisisse,
   Où d'estre sans Elise, ou d'aller au supplice;
   On me donne à choisir, ou d'aimer Amintas,
   Que je ne puis aimer, ou de voir ton trépas.
   Laisseray-je perir un Amant que j'adore?
   Feray-je mon espoux d'un Prince que j'abhorre
   Parle, ouvre-moy ton coeur, & sans dissimuler,
   Fay voir à mon amour où le tien peut aller.
   Choisis sans hesiter de la vie, ou d'Elise;
   A ton choix, quel qu'il soit, elle sera soûmise.
   Si ton ame s'estonne & redoute la mort,
   Quand le Prince qui m'ayme, & que je hay s